Histoire des Super Randonnées


Naissance (2008)

L’origine des Super Randonnées se confond avec la trajectoire personnelle de Sophie Matter. En 2008, elle habite en Provence, elle a une licence de cyclotourisme dans le club local de Carcès (Var), et pédale de façon indépendante. Depuis son troisième Paris-Brest-Paris Randonneur en 2007, elle ne cesse de se lancer de nouveaux défis, de plus en plus durs. Ayant sympathisé avec un groupe d’Américains de Seattle sur ce même PBP, elle mesure à quel point les brevets randonneurs se sont répandus à l’étranger, et rêve d’aller effectuer des 1200 à l’autre bout du monde. La longue distance à vélo la passionne à tel point qu’elle travaille à créer un répertoire mondial du cyclisme de longue distance, en même temps qu’elle publie ses comptes rendus sur son blog, Rando Spirit.

L’année 2008 est marquée par une succession de défis personnels et de participations à des épreuves de toute sorte, toujours en montagne. En mai 2008, elle effectue, en totale autonomie, la Bicinglette (six fois le Mont Ventoux en 24h), randonnée permanente proposée par Christian Pic, Président du Club des Cinglés du Ventoux ; puis la randonnée Luchon – Bayonne (brevet cyclo-montagnard figurant au calendrier de la Fédération Française de Cyclotourisme), de 327 kilomètres et 5257 mètres de dénivelé.

Fin juin 2008, elle participe à la Fausto Coppi Super Randonnèe, organisée par Ivano Vinai et l’association Fausto Coppi on the road, au départ de Cuneo, dans le Piémont italien. Ce sont 510 km et plus de 11300 mètres de dénivelé, à effectuer en 44 heures. Sophie est rassurée que la moyenne minimale soit d’environ 12 km/h, comme sur les brevets cyclo-montagnards de la FFCT. Il y a 5 contrôles intermédiaires (par tampon) ; un ravitaillement ; deux dortoirs avec restauration. Certains cyclistes roulent en autonomie, d’autres ont un véhicule d’assistance : celle-ci est autorisée en 13 points du parcours, parmi lesquels les sommets des cols. Sophie est enthousiasmée par cette expérience. La Super Randonnée italienne lui rappelle les brevets cyclo-montagnards français, en plus long. A l’époque, il n’existe pas, en France, d’aussi long brevet montagnard organisé à date fixe.

En revanche, l’ultracyclisme se développe en France, avec le Raid Provence Extrême (RPE) et le Raid Extrême Vosgien (REV). Organisé par Jean-Claude Arens, le REV 2008 mesure 530 km et 12500 m de dénivelé. C’est une course (avec podium à l’arrivée) ; il est interdit de rouler dans la roue d’un concurrent ; la moyenne minimale est de 17,5 km/h ; le niveau requis est très élevé. La logique de l’ultracyclisme est d’optimiser la performance (voiture suiveuse en permanence). Pourtant, sur le REV, les cyclistes sans assistance sont autorisés à participer dans leur catégorie, et l’organisation a prévu des ravitaillements. Sophie s’est inscrite par curiosité, par défi, et par amour des Vosges, mais elle aurait préféré une épreuve mieux adaptée à sa manière de pratiquer la longue distance: absence de compétition, délais plus généreux, valorisation de l’autonomie. Sans parler de l’aspect financier : la participation aux épreuves d’ultracyclisme, en France ou à l’étranger, coûte fort cher (le plus abordable est le REV) ; rien de comparable avec les tarifs en usage chez les cyclotouristes.

En juillet 2008, Sophie réalise un de ses rêves. Accueillie par ses nouveaux amis américains, elle participe à la Rocky Mountain 1200, au Canada. À l’arrivée de la randonnée, à Kamloops, Sophie rencontre Robert et Suzanne Lepertel. Ils sont en visite chez leurs amis randonneurs de Colombie Britannique. Elle ne les connaît que de réputation. Robert et Suzanne ont été organisateurs de sept Paris-Brest-Paris (1971, 1975, 1979, 1983, 1987, 1995 et 1999). Robert dit « Bob » a présidé l’Audax Club Parisien de 1972 à 1983. Il est à l’origine de l’association Les Randonneurs Mondiaux, créée en 1983. Le couple voyage beaucoup, et entretient des liens d’amitié avec leurs correspondants internationaux. Ravis de voir une Française participer à un 1200 des Randonneurs Mondiaux, ils l’invitent à la prochaine Assemblée Générale de l’Audax Club Parisien, qui se tient à la fin de l’année.

De retour en Provence, nourrie de ces expériences variées, et profitant d’un bon entraînement, Sophie s’attaque à un nouveau défi : la Super Randonnée Jean Giono. C’est un défi personnel, qu’elle a elle-même imaginé. Les sources d’inspiration sont diverses. Distance et délai sont ceux d’un brevet randonneur classique : 600 km en 40 heures. Le parcours est inspiré du Raid Provence Extrême (tour complet des Gorges du Verdon, montagne de Lure et Ventoux), auquel elle a ajouté quelques cols, pour obtenir le chiffre symbolique de 10000 mètres de dénivelé (mesuré sur le planificateur de parcours en ligne qu’elle utilise à l’époque : openrunner). Sophie a baptisé son défi Super Randonnée, en hommage à la Super Randonnèe Fausto Coppi, le plus long brevet montagnard auquel elle ait jamais participé, et Jean Giono, en hommage au poète de Haute Provence.

Après plusieurs tentatives malheureuses, Sophie boucle sa Super Randonnée en 38h30, le 1er octobre 2008. Enthousiaste, elle en fait le compte-rendu sur son blog, mettant à disposition de ses lecteurs la carte routière, la feuille de route, le profil et d’autres informations encore. Mais les problèmes surgissent.

D’abord, l’héritière de l’écrivain, Madame Sylvie Durbet-Giono, par la voix de l’Association des Amis de Jean Giono, accepte l’utilisation du nom de Jean Giono, mais refuse l’appellation Randonnée, au motif que des manifestations littéraires sont déjà organisées sous ce nom. Pour Sophie, pas question de renoncer au nom de randonnée, qui unit à ses yeux : cyclotourisme, longue distance, dépassement de soi, autonomie, liberté et camaraderie ; un nom qui se rattache à la tradition du Paris-Brest-Paris Randonneur, et qui est utilisé, dans le monde entier, par les fédérations qui organisent les brevets qualificatifs. La Super Randonnée Jean Giono devient donc Super Randonnée de Haute Provence.

Ensuite, ayant incité d’autres cyclistes à faire sa Super Randonnée, Sophie envisage d’utiliser son blog pour publier une liste des inscriptions, un règlement, et les futurs résultats ; ce qui équivaut à devenir organisatrice. Mais elle ne se sent pas capable de franchir seule ce pas. Christian Pic lui donne des explications techniques et lui conseille de se rapprocher d’une association sportive, ou d’un créer une. Le club de Carcès, auquel Sophie est licenciée, ne s’intéresse pas à la longue distance.

Or, en décembre 2008, Sophie se rend à l’Assemblée Générale de l’Audax Club Parisien, sur l’invitation de Bob et Suzanne Lepertel. Depuis qu’elle a découvert les Randonneurs Mondiaux, son admiration pour ce club centenaire n’a fait que grandir. Elle présente son projet de Super Randonnée, l’idée est accueillie très favorablement et Jean-Gualbert Faburel, Vice-Président et responsable des Brevets de Randonneurs Mondiaux à l’international, l’assure de son soutien. Sophie adhère à l’Audax Club Parisien. L’Audax Club Parisien décide de prendre en charge l’organisation de la Super Randonnée, et lui en confie la responsabilité.

La naissance de la Super Randonnée de Haute Provence est annoncée publiquement lors de la traditionnelle cérémonie de remise des récompenses de l’Audax Club Parisien, début janvier 2009.